Partager la publication "Management de soi et des autres : le droit à l’erreur"
Il y a quelques temps, j’assistais à une conférence organisée par le CJD sur le thème du « droit à l’erreur dans nos organisations ». Cette notion peut être étudiée sous plusieurs angles :
- au regard de l’organisation: quels avantages pour l’entreprise?
- ou l’angle du manager: quel est le mode de management à adopter?
- ou celui du collaborateur, de l’individu: comment envisager le management de soi?
Cette conférence a inspiré cet article, car je fais souvent le constat que les individus qui me consultent (dirigeants, managers, salariés, voire même étudiants) sont peu enclins à reconnaître leur propre droit à l’erreur.
L’influence de l’éducation et de notre société
En effet, la société ne nous autorise pas le droit à l’erreur. On nous formate, dès le plus jeune âge, à être:
- de « bons » enfants,
- de « bons » élèves,
- de « bons » salariés,
- de « bons » parents
- de « bons » patrons … et donc, admettre une faute reste souvent du domaine de l’inavouable.
Ce sentiment narcissique de toute puissance, « je n’ai pas le droit à l’erreur » n’est pas sain, ni mâture d’ailleurs. Une étudiante de 2è année d’école de commerce me confiait « je ne pense pas être prise pour ce stage car je n’ai pas les compétences ». Et d’être surprise de ma question : « S’agit-il d’un poste ou d’un stage ? »
Et si le droit à l’erreur nous faisait grandir?
Voici une petite anecdote de maman… Préparant une visite au Musée de la Piscine à Roubaix, l’institutrice de mon fils (7ans – CE1) demandait à la classe s’ils connaissaient des peintres… Hugues ayant découvert le street art avec moi et surtout, disposant d’une bonne confiance en lui, évoque tout naturellement un peintre que nous affectionnons tous les deux : Jonone.
Sa réponse, assez catégorique et, aurait pu en destabiliser plus d’un: «NON, ce n’est pas un peintre ». Visiblement, cette enseignante, ne connaissait pas cet artiste. Je vous laisse imaginer ce qu’a ressenti mon fils après cette réponse, devant ses camarades. En en discutant avec lui, je relevais plusieurs éléments:
- une immense déception,
- l’impression d’être un peu « bête » par rapport aux autres
- tout un chapelet de réflexions du style « je ne lèverai plus jamais la main« , « la maîtresse a raison« …
Heureusement, nous avons pu en discuter, afin de remettre de la cohérence dans tout cela… Je pense aussi qu’un enfant plus réservé, se serait tût à jamais …
Un autre scenario aurait pu être celui-ci: « tu es certain de ce que tu me dis Hugues ? je ne connais pas ce peintre … Prenons le temps de regarder sur Google ensemble, de qui s’agit-il? ».
Ou encore, « je ne connais pas tous les peintres de la terre, on va regarder ensemble sur internet »; « Je ne suis pas DIEU » disait l’un de mes professeurs ….
En somme, admettre le droit à l’erreur lorsque l’on est parent, enseignant ou manager, c’est AUSSI faire grandir ses enfants, élèves, ou collaborateurs. C’est aussi les autonomiser et les responsabiliser. Autrement dit, augmenter leur confiance en eux; on parle aujourd’hui de « manager jardinier »…
C’est aussi grandir soi-même et s’enrichir des autres, fûssent-ils des enfants !
Innovation et droit à l’erreur: Quelques principes théoriques
Oui ! Figurez vous que l’on peut associer le droit à l’erreur à l’innovation!
L’un des conférenciers nous explique 3 grands principes :
- La Sérendipité : c’est-à-dire inventer des choses auxquelles on ne s’attend pas ; c’est l’exemple du pace maker et John Hopps, Alexander flemming et la pénicilline, la tarte tatin …
- L’Innovation; tester de nouvelles choses même si l’on prend des risques, nous amène à innover
- Le Retour d’expérience : permet l’AMÉLIORATION continue, la détection des non conformités, de comprendre comment les erreurs produites ont perturbé le système.
Individu ou Entreprise: même combat !
L’accélération des innovations, dans un monde de plus en plus connecté, m’amène à penser que seules les entreprises capables de se remettre en cause, dans le développement de leurs produits ou services s’en sortiront. Notamment par :
- des co-constructions issues des besoins de leurs clients
- des innovations issues d’un travail de partenariat avec les acteurs de leur propre environnement, avec les concurrents, aussi!
Se remettre en cause est donc une question de « survie » aujourd’hui et cela n’est possible que si l’on connaît bien ses fondations : c’est à dire, nous, nos valeurs, notre raison d’être:
- Adopter des décisions et des stratégies qui nous ressemblent.
- Etre aligné avec soi même, individu ou entreprise, afin d’afficher un profil « safe », « intègre ».
Ainsi, la culture de la non punition suite à une erreur, permet à une entreprise d’être agile et de s’adapter rapidement à son environnement. L’innovation provient bien de nos erreurs et nous en libérer, nous assure davantage de créativité.
Droit à l’erreur et confiance en soi
De même, « Savoir dire non » à un manager lorsque nous pensons qu’il se trompe, ou à la maîtresse lorsqu’elle n’est pas au courant qu’un peintre du nom de JONONE est un graffeur devenu célèbre par le mouvement et la couleur de ses toiles, …. C’est aussi avoir confiance en soi …
Bien sûr, il ne s’agit pas de dire NON pour dire NON ; mais d’étayer son point de vue, et de proposer des solutions alternatives …. Et cela, nous en sommes TOUS capables dès lors que nos arguments sont factuels et concrets.
Et les conférenciers de nous rappeler que:
- Un enfant tombe 2000 fois avant de savoir marcher.
- Que les grandes réussites de notre monde sont souvent nées d’erreurs.
Ainsi, le manque de confiance en soi est donc bien en lien avec la peur de faire des erreurs. Infantiliser un salarié dans des tâches subalternes ne l’amène pas à prendre des initiatives.
En conclusion, voici quelques conseils
Pour se manager Soi, rien de tel que de:
- Travailler vos peurs en tant que manager ou dirigeant d’entreprise; les identifier, trouver des parades pour déléguer sans pour autant « délaisser »… C’est un travail de développement personnel que de reconnaître ses erreurs, de les entendre et de savoir en parler aux autres, sans culpabilité
- Libérer la parole et oser parler de vos erreurs, en montrant que cela vous arrive à vous aussi
- Evangéliser sur ce sujet et remettre aussi du sens, en différenciant bien l’erreur de la faute ; cette dernière étant davantage intentionnelle ou l’équivalent d’une erreur qui se répète, révélant souvent une incompétence.
Pour aller plus loin sur ce sujet…
- TedX Kathryn SCHULZ : https://www.ted.com/talks/kathryn_schulz_on_being_wrong?language=fr
- Gael CHATELAIN Auteur inspirant et conférencier, lui aussi présent ; son livre « Mon boss est nul, mais je le soigne » https://www.labourseetlavie.com/linterview/gael-chatelain-consultant-et-auteur-de-mon-boss-est-nul-mais-je-le-soigne
- Enfin, si vous souhaitez approfondir personnellement le sujet, rencontrez nous!